Certains prêtres ont des passions. Pour don Jean-Yves, il s’agit du vélo, qui lui sert non seulement comme moyen de déplacement, mais aussi d’outil d’évangélisation. Tout en lui permettant de vivre selon l’esprit Laudato Si. Témoignage…
Quelle est votre histoire avec le vélo ?
Je me suis mis tardivement au vélo, après que l’on m’ait offert mon premier vélo de route en 1999, alors que j’étais à la paroisse Saint-Raphaël. J’ai participé au 1er championnat cycliste du clergé, lancé par don Pierre-Marie de Framond en 2000, un peu par solidarité sportive. En réalité, cet événement a été pour moi comme la révélation que ce sport était très intéressant aussi bien mentalement et tactiquement que physiquement. Envoyé quelques temps après à Cuba en mission, j’y ai créé un Club cycliste catholique paroissial (le C.C.C.P.) avec les jeunes de Placetas, faisant du vélo à la fois le moyen de déplacement quotidien et un sport personnel et pastoral ! Rentré en France en 2016, j’ai décidé de ne pas racheter de voiture, mais de privilégier l’alliance bien connue de la soutane et de la petite reine. Pour les plus longs voyages, le vélo se conjugue avec le train. Aujourd’hui, en tant que curé d’Arles, le vélo reste un outil utile et pastoral pour moi. Avec les hommes de la paroisse j’ai créé un nouveau C.C.C.P. Et je continue de participer au championnat de France cycliste du Clergé, dès que je peux, avec 5 ou 6 participations à mon actif à ce jour ! Si j’ai adopté ce mode de transport, c’est donc tout à la fois par souci d’écologie, de sobriété et pour le goût de l’effort physique, voire de quelques défis à l’occasion.
Quelle place prend le vélo dans votre ministère ?
Je revendique le caractère prophétique de la non utilisation d’un véhicule à moteur, et mon option doit interpeller sur les conséquences concrètes possibles de la lecture de Laudato Si. Il y a en effet beaucoup d’autres manières de vivre la conversion à une vie plus sobre et embrassant les orientations de l’écologie intégrale. D’autre part le vélo est, en soi, un bel outil pastoral. On le constate, par exemple, au cours des pélés VTT qui existent dans une trentaine de diocèses. Les camps vélo ou les vueltas organisées à Placetas me l’ont confirmé d’ailleurs. L’été dernier, avec 12 coureurs nous sommes partis dans un périple intitulé « Vélo l’alto », 550 km en 5 étapes avec 15 000m de dénivelé, faisant un Tour du Mont Blanc entre France, Suisse et Italie : une aventure humaine, sportive et spirituelle très forte !

Dans votre paroisse, avez-vous mis en place des pratiques écologiques concrètes ?
Notre paroisse d’Arles est depuis 2 ans dans le mouvement d’Eglise verte https://www.egliseverte.org/. C’est un outil qui permet de motiver les fidèles et pasteurs dans la dynamique de la conversion écologique, prenant en compte tous les aspects de la vie paroissiale. Le processus commence par un diagnostic qui permet de mesurer le grand écart bien souvent entre nos préoccupations écologiques et la réalité du terrain. Il s’agit ensuite de se décider à faire un pas, l’un après l’autre (dans la liturgie, les transports, les bâtiments, etc.). C’est dans cet esprit que nous avons lancé le projet de « Maison du Carmel » https://paroisse-catholique-arles.fr/carmel/, un lieu d’accueil pastoral, intergénérationnel et écologique, dont le principe d’écologie intégrale est au cœur, pour répondre à de nombreux enjeux, tant ecclésiaux que sociétaux.
Est-ce que l’encyclique du Pape François, Laudato Si, vous a encouragé à aller dans ce sens ?
Bien entendu, en particulier dans son lien avec l’option 0 auto ! Tout le premier chapitre de l’encyclique permet de prendre conscience concrètement de la gravité de la situation et de la nécessité de passer à l’action, d’une manière ou d’une autre. Ce n’est pas seulement pour un bilan carbone meilleur : en adoptant un moyen de locomotion comme le vélo, on reprend pied avec la réalité du terrain, du climat, et du temps. Notre monde moderne est dans une lutte constante contre la montre et l’espace. On voudrait être en même temps ici et là. Il y a une tentation forte de parvenir à l’ubiquité (privilège pourtant divin, ou au moins angélique) au lieu d’être dans l’action de grâce pour le temps et l’espace qui marquent l’expérience humaine.