Lectio divina – Quatrième dimanche du temps ordinaire

Dt.18, 15-20 1Cor.7, 32-35 Mc.1, 21-28

Ez 37, 12-14 // Rm 8, 8-11 // Jn 11, 1-45

Notre mère l’Église nous rappelle une vérité souvent oubliée. Cette vérité est que la charité que nous portons à l’homme est dépendante, dans sa valeur réelle, de l’adoration que nous élevons vers Dieu.

Si notre adoration de Dieu est totale, sans partage, si elle n’est pas diminuée par une vénération portée envers d’autres réalités, alors l’amour que nous aurons pour tout homme sera celui d’une vraie charité. Tout homme, c’est d’abord nous-même. Mais c’est aussi, bien sûr, notre frère, notre conjoint, nos enfants, nos relations, nos collègues de travail, tous ceux enfin qui partagent cette belle humanité irréductible à tout autre animal de la planète.

Être tout à Dieu pour être tout à l’autre…

Il nous faut donc revenir à cette nécessité d’être tout à Dieu pour être tout à l’autre. Et cela nous gêne, car nous voudrions être tellement indépendants, capables d’aimer par nous-mêmes ceux que nous avons choisis pour fleurir notre chemin de vie : famille amis etc… ! Aurions-nous vraiment besoin d’un Autre pour aimer notre conjoint, que nous avons choisi ? l’enfant que nous avons tant désiré ? L’amour est-il si peu naturel qu’il aurait besoin d’un adjuvant ?

Mais l’amour s’enracine dans la liberté. Il n’y a d’amour que d’un cœur libre capable de se donner jusqu’au bout sans aucune contrainte. Comme Jésus qui aima les siens jusqu’à la fin… Est-ce bien notre cas ? Partageons-nous cette liberté absolue de Dieu ? N’aurions-nous pas, au contraire, des idoles à la fois personnelles et partagées par tous, tapies au fond de l’âme et l’empêchant d’être pleinement elle-même, totalement tournée vers l’autre pour se donner tout à lui ?

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

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La boutique aux idoles…

Entrons et faisons un tour dans la boutique aux idoles

Voyons ce que nous vénérons à côté du Dieu que seul nous devrions adorer. Laissons de côté cette grosse idole de Mammon, l’argent, qui cache bien souvent la forêt de milliers d’autres divinités plus sournoises… Je me plais à regarder en moi les cordages qui haubanent ma vie et se tendent automatiquement quand les intempéries de celle-ci me ballottent. Je les classerais volontiers en trois catégories d’égale et néfaste utilité.

D’abord l’idolâtrie du passé. Je contemple avec prédilection mes racines familiales ou sociétales, ce que j’ai accumulé en savoir et diplôme, et surtout ce que j’ai fait… Ces exploits remarquables, ces faits d’armes exceptionnels, ces actions inestimables, voilà de quoi me rassurer dans la bourrasque en me rappelant que je suis quand même bon à quelque chose, tout de même…

Devant un tel bilan Dieu Lui-même rend grâce et s’agenouille en me priant de poursuivre… Je suis donc lié par l’égoïsme et ma liberté est entravée. Puis-je alors aimer l’autre d’un amour oblatif qui oblige à m’oublier pour lui ?

Les talonnettes du mensonge…

L’idolâtrie du présent. C’est la plus visible, si ce n’est la plus agaçante. Personne n’y échappe par lui-même et nous tombons tous dans cet affreux piège du besoin de reconnaissance. C’est le désir d’être reconnu pour sa valeur, réelle ou imaginaire, car on s’aveugle souvent à ce propos ! Cela peut se traduire également par la demande, a priori légitime, de justice. Ou de défense de son honneur. Que d’idoles se cachent derrière ces valeurs qui ont pu être sources de nombreux bienfaits dans l’Histoire… Mais de combien d’horreurs ont-elles été aussi les marâtres ?

Hésitons-nous encore sur le point de savoir si cette idole nous lie ? Regardons alors la Personne de Jésus et ce qu’elle nous apprend d’abnégation, d’oubli de soi, de silence et d’acceptation. Contrairement à Elle, nous ne faisons que nous mettre en avant, attirer le regard, nous hausser de quelques centimètres par les talonnettes du mensonge, ou du mentir vrai. Nous sommes donc liés par le mensonge permanent, notre liberté est entravée. Pouvons-nous aimer l’autre d’un amour vrai, si nous vivons dans le paraître ?

Habiter un ailleurs où l’autre ne peut me rejoindre…

L’idolâtrie du futur. La plus subtile, mais la plus lourde à porter, comme le remarquait Bernanos écrivant combien était lourd sur nos épaules le poids de nos illusions.

C’est effectivement le futur, ou pire le conditionnel, deux temps de prédilection du Mauvais, qui gèrent notre attitude. Je ne vis plus dans le présent, mais dans le futur, par ambition (pour obtenir, c’est aussi l’envie) ou dans l’avarice (pour garder, c’est aussi la jalousie). Je suis donc lié par l’orgueil, ma liberté est entravée.

Puis-je aimer l’autre d’un amour humble qui oblige à me laisser approcher si je fuis dans un ailleurs où l’autre ne peut me rejoindre ?

Se laisser consumer pour renaître à Sa vie !

Ces idoles sont au milieu de nous, dans notre for intérieur et intime. Elles prennent la place du Christ, le Grand Prophète annoncé dans la 1ère lecture. Au lieu de L’entendre, Lui, je les écoute, elles. C’est plus agréable car elles semblent me promettre la vie, alors que Dieu me demande de mourir en me laissant purifier tout entier par Son feu d’amour et de vérité.

Se laisser consumer pour renaître à Sa vie : Dieu ne peut faire autre chose que de ne pas partager. Il veut tout me prendre à moi pour Se donner entièrement à moi ! Son exigence est une exigence d’amour ! Il est vrai que c’est souvent pour nous un oxymore. Car pour nous, si j’aime, je dois pouvoir librement cesser d’aimer, ou pouvoir partager avec d’autres l’amour que je porte. Perdant le sens de l’amour comme expérience globalisante du Bon (et du bon) qui nous aimante et nous fixe pour notre bien le plus essentiel, profond et éternel, nous avons fait de l’amour un ressenti qui se modifie au gré du vent et nous met ainsi dans la confusion la plus extrême.

Avoir le souci des affaires du Seigneur…

C’est pourquoi, dans le passage de l’épître aux Corinthiens de ce dimanche, Paul nous supplie de renoncer à nos idoles et d’être libres de tout souci. Selon l’étymologie, l’idole est ce qui nous prend totalement, nous sollicite, nous remue, nous trouble et nous dérange, c’est-à-dire, nous met hors du bon ordre.

Il nous exhorte au contraire d’avoir le souci des affaires du Seigneur, c’est-à-dire d’être tout orienté vers Lui, sans partage. Que le Seigneur soit Lui seul notre affaire : Deus meus et omnia ! disait François d’Assise.

Alors, me direz-vous, ne faut-il pas aimer sa femme ? son époux ? ses enfants ? Si bien sûr ! Mais il faut aimer l’autre avec l’Amour du Christ, pour pouvoir aimer parfaitement, oblativement, sans limite et sans réserve : « Aimez-vous comme je vous ai aimés… »

Et pour ce faire, il faut désirer recevoir cet Amour du Christ pour l’autre. Il faut rechercher le Christ et Sa charité, il faut s’unir à Lui pour participer de Son Esprit d’Amour. C’est pourquoi Jésus nous demande de rechercher le Royaume (son Esprit) et tout le reste nous sera donné de surcroît (en particulier l’amour qui est l’essentiel de la vie).

Pratiquons le Christ !

La pratique religieuse n’interdit pas les idoles. Nous le voyons bien dans l’évangile puisque le possédé est dans la synagogue. Aussi, ce n’est pas parce que nous pratiquons le dimanche que nous sommes exempts d’idolâtrie.

C’est la pratique du Christ, de Son Esprit, de Sa Parole qui peut, seule, nous préserver. Seul le Christ qui vient à nous par Sa Parole et en Elle (Parole écrite, Parole sacrifiée de l’Eucharistie) peut nous faire grandir, car Lui seul proclame la vérité avec autorité, l’autorité étant ce qui fait croître. Lui seul proclame la vérité avec ce pouvoir divin de faire grandir l’homme jusqu’à la stature d’homme parfait, à l’image de ce qu’Il est Lui-même : le Fils ne faisant qu’un avec le Père par l’Amour de l’Esprit.

Mgr Jean-Marie Le Gall

Communauté Saint Martin

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Mgr Jean-Marie Le Gall – Communauté Saint Martin

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Qu’est ce qu’une lectio divina ?

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

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Biographie

Jean-François Guérin

Jean-François Guérin naquit à Loches au cœur de la Touraine le 25 juillet 1929 d’Albert Guérin et de Camille Linard, charcutiers dans cette ville ; il fut baptisé le 9 mars 1930 dans la collégiale Saint-Ours sous le prénom de Jean. Ses deux parents sont originaires d’Artannes-sur-Indre où il suivit sa première scolarité, dans une famille qui n’était pas particulièrement marquée par la foi.

Installé chez sa mère à Paris, il s’ouvrit de sa vocation à un prêtre de Versailles. C’est pourquoi, contre l’avis de sa famille, il entra au séminaire de Versailles, en 1949, à vingt ans. Les premières années de sa formation furant vraiment fondatrices pour lui, marquées par la forte spiritualité sacerdotale enseignée par les formateurs sulpiciens. Ces années furent coupées par son temps de service militaire en Tunisie et marquées par le décès de son père. Premier tournant dans son itinéraire : il décida de quitter Versailles pour revenir à Tours, puis il intégra le Séminaire français de Rome et, le 29 juin 1955, il fut ordonné prêtre en la cathédrale Saint-Gatien par Mgr Gaillard.

D’abord vicaire à la cathédrale de Tours, il fut nommé aumônier des lycées Descartes, Balzac et Grandmont à Tours où sa santé souffre un peu de l’intensité de son engagement auprès des jeunes. Souvent il les emmena à Fontgombault, une abbaye bénédictine qui eut une importance centrale dans sa vie et son sacerdoce : il en devint oblat en 1961. Quittant Tours, il fut envoyé à Paris pour des études de droit canonique, qu’il commença en 1965.  Pendant ces études, il était aussi confesseur à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, où il fut inspiré par les intuitions ecclésiales et missionnaires de Monseigneur Charles, recteur de la Basilique, avec lequel se créa une amitié. Les études terminées, il devint délégué général de l’Œuvre d’Orient en 1968 et garda cette charge, qui consistait à recueillir des fonds pour aider les écoles, dispensaires et œuvres caritatives dans les paroisses de toute la France, jusqu’en 1975.

À Paris, son ministère se déployait entre l’œuvre d’Orient, la mission de chapelain au Sacré Cœur et un ministère qui se dessina peu à peu auprès d’étudiants, hommes et femmes, qui le rejoignirent bientôt pour une heure d’adoration silencieuse mensuelle, à Montmartre. De ce silence, naquit l’idée d’une messe hebdomadaire en 1968. Elle est célébrée à la chapelle du Bon Secours, rue Notre-Dame-des-Champs, chapelle toute proche des bureaux de l’Œuvre d’Orient. L’abbé Guérin entendait donner à ces jeunes gens une solide formation centrée sur la vie intérieure, la vie sacramentelle, sur le discernement des vocations, mariage, sacerdoce, vie religieuse. Son action apostolique auprès de ce groupe comprendra aussi des camps – un mélange entre retraite et vacances, ce qui donna naissance aux futurs « Routes Saint-Martin ». Mais dans le temps de la réforme liturgique, il leur transmit aussi sa docilité envers les décisions du Concile et du Pape, face à certains qui ne veulent rien entendre sur le nouveau missel promulgué par le Pape Paul VI.

Proche des moines bénédictins de Fontgombault et des Sœurs Servantes des Pauvres, l’abbé Guérin accompagna des jeunes vers des vocations religieuses, contemplatives et apostoliques. Mais, plusieurs jeunes gens lui partagèrent leur désir de devenir prêtres diocésains. En février 1976, le cardinal Siri, archevêque de Gênes et Dom Jean Roy, Père Abbé de Fontgombault, se rencontrèrent à Rome où ce dernier demanda au cardinal s’il est possible d’accueillir des amis français à Gênes. L’accord fut immédiat : les études au séminaire seraient gratuites et un couvent capucin situé à dix-sept kilomètres du centre-ville serait mis à leur disposition. C’est alors que le 1er novembre 1976, commença la Communauté Saint-Martin par un cours intensif en italien ; suivirent les travaux à entreprendre au couvent de Voltri qui est en très mauvais état. Les années italiennes furent celles de la fondation, avec l’appui constant du cardinal Giuseppe Siri, qui, à sa démission, nomma l’abbé Guérin chanoine d’honneur de sa cathédrale.

L’année 1993 fut celui du retour en France, pour les membres de la Communauté. Aidé par les premiers membres, l’abbé Guérin guida cette installation à Candé-sur-Beuvron, dans le diocèse de Blois. Ce furent des années plus difficiles, marquées par différents problèmes de santé. L’abbé Guérin fut de plus en plus secondé. En février 2004, il présenta sa démission. Demeuré à Candé, il fut rappelé à Dieu le 21 mai 2005. Après ses obsèques à la cathédrale Saint-Louis de Blois, il fut inhumé au cimetière d’Artannes-sur-Indre, son village natal.

Le 18 juillet 2024, un communiqué faisant état des conclusions du rapport de la visite pastorale a révélé des faits reprochés par plusieurs anciens membres de la communauté à l’abbé Guérin. Nous entendons avec douleur la souffrance que certains ont pu exprimer auprès des visiteurs et allons effectuer courageusement ce travail de relecture qui permettra de faire évoluer cette page. Afin de recueillir la parole des personnes qui souhaiteraient se manifester, vous pouvez contacter, au nom de Mgr Matthieu Dupont qui a été nommé assistant apostolique de la communauté, la Cellule d’écoute des diocèses des Pays-de-Loire à l’adresse suivante : paroledevictimespaysdeloire@gmail.com

Biographie

Don Paul Préaux

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Don Paul Préaux, né le 6 octobre 1964 à Laval (Mayenne), rentre au séminaire de la Communauté Saint-Martin alors installée à Voltri (diocèse de Gênes, Italie) en 1982. Il est ordonné diacre en avril 1988 à Saint Raphaël (Var) par le cardinal Siri et obtient son baccalauréat de philosophie et de théologie. L’année suivante, le 4 juillet, il est ordonné prêtre à Gênes par le cardinal Canestri.

En 1990, don Paul obtient une licence canonique de théologie dogmatique à Fribourg (Suisse) et devient responsable de la maison de formation de Voltri. Il est envoyé à Rome en 1992 pour l’année d’habilitation au doctorat et commence ensuite sa thèse.

Nommé, en 1995, chapelain au sanctuaire de Notre-Dame de Montligeon (Orne), il devient recteur de ce sanctuaire consacré à la prière pour les défunts, charge qu’il occupera jusqu’à son élection comme Modérateur général de la Communauté Saint-Martin. Pendant cette période, don Paul est également membre du conseil presbytéral du diocèse de Sées pendant six ans et secrétaire du même conseil pendant 3 ans.

Docteur en théologie en 2005, don Paul est l’auteur d’une thèse sur Les fondements ecclésiologiques du Presbytérium selon le concile Vatican II et la théologie post-conciliaire. Enseignant la théologie dogmatique à l’École de théologie de la Communauté, depuis 1993, il intervient également dans différents lieux d’enseignement, comme le Centre d’études théologiques de Caen. Il est également sollicité pour prêcher des retraites et intervenir dans différents diocèses et communautés, notamment des thèmes de la spiritualité sacerdotale et de l’espérance chrétienne, sur lesquels il a publié des ouvrages.  Renvoi à la page de ses publications.

Le 26 avril 2010, don Paul Préaux est élu Modérateur général de la Communauté Saint-Martin et réélu en 2016 à cette charge pour un nouveau mandat de six ans. Il est à nouveau élu à cette charge en 2022 pour un dernier mandat.