Entretien avec le cardinal Ambongo

Archevêque de Kinshasa, président du symposium des conférences épiscopales d’Afrique, membre du conseil du pape (C7) et acteur majeur du synode sur la synodalité, le Cardinal Ambongo est venu nous visiter à l’occasion des Assises

Quelles sont les joies et les enjeux de l’Église d’Afrique ?

L’Église d’Afrique est jeune parce que la société est jeune, remplie d’enfants ! Les célébrations eucharistiques sont véritablement des fêtes où les fidèles viennent de bon cœur et ne comptent pas leur temps. Même si c’est une Église qui n’est pas autonome sur le plan matériel puisqu’elle évolue au sein d’une société où règne la misère, les fidèles sont joyeux, ils s’accrochent à la vie.

Beaucoup de joie donc, mais aussi beaucoup de souffrance, liée aux conditions des pays : la misère, les conflits, les calamités… Un autre défi important est la multiplication de « nouvelles églises », des sectes sans doctrines, souvent liées au pouvoir public, et qui promettent un bonheur immédiat sans la croix du Christ.

Qu’est-ce que le conseil des cardinaux (C7) dont vous faites partie ?

C’est un conseil lié à la personne du pape : il nous a nommés et il soumet à notre évaluation certains thèmes, pour l’accompagner dans sa mission de réformer l’Église. Nous sommes ses conseillers : nous délibérons et le pape nous écoute beaucoup. Il veut savoir comment un même thème résonne en Afrique, en Europe, en Amérique du Nord, du Sud, en Asie… c’est une expérience de l’Église universelle qui est essentielle car parfois, en Europe, on pense que l’Église est en train de mourir, mais ce n’est pas vrai ! Ailleurs, il y a du dynamisme. Et ce sont peut-être ces Églises qui viendront ensuite apporter un souffle nouveau à l’Église d’occident.

Comment les chrétiens peuvent-ils s’engager encore aujourd’hui dans le synode ?

La première phase du synode a produit deux documents : la « Lettre à tous les fidèles » et le rapport-synthèse. Le but de ces deux documents est de retourner le dossier à ceux qui avaient commencé ce processus dans les paroisses. On leur dit : « Voilà ce qui a été fait à tous les niveaux, et pour telle question que vous aviez posée, voilà les convergences, voilà les questions restées ouvertures… » Le même qui avait suivi le processus au départ doit maintenant lire le rapport, s’engager à en travailler les thèmes, et faire remonter ses analyses à Rome. Les forces vives de l’Église doivent traiter les questions qui les concernent. Le destinataire final de tous ces documents est le pape, qui avec toutes ces analyses, rédigera finalement l’exhortation post-synodale.

Comment faire pour que cette perspective synodale soit l’objet d’une véritable espérance ?

C’est le rôle de ceux qui ont fait l’expérience de la synodalité que d’aller convaincre les autres de la justesse de cette expérience. Le rôle des prêtres est capital ici : ils devront expliquer, convaincre les fidèles de la justesse de cet esprit synodal.

Comment définissez-vous l’esprit de synodalité ?

L’esprit de synodalité, c’est le retour à la première communauté de Jérusalem. On a l’impression que dans cette communauté, on était plus à l’écoute de l’Esprit-Saint qu’aujourd’hui : quand un problème se posait, ils se mettaient ensemble, priaient, et ensuite arrivaient ensemble à la solution, sous l’influx de l’Esprit. La synodalité, c’est le retour à cette pratique grâce à la conversation dans l’Esprit, qui est la méthode adoptée dans la première session : quand un autre parle, laisser un temps de silence pour que cela résonne dans mon cœur, et ensuite chercher ce que me dit l’Esprit-Saint pour, ensemble, trouver sa volonté.

En faisant cela, on ne peut laisser personne au bord du chemin, parce que chaque personne est créée à l’image et à la ressemblance de Dieu. Jésus allait vers les autres, les pécheurs, sans dire que ce qu’ils faisaient était bon. Mais après, ils changeaient souvent de vie et suivaient Jésus…

L’Église ne peut pas fuir quelqu’un sous prétexte qu’il ne mène pas une vie morale.

Avec votre regard continental et universel, comment envisagez-vous les chemins d’évangélisation pour l’occident déchristianisé ?

L’avenir de l’Église en occident passe par l’expérience de la synodalité. Si l’Église d’occident veut se sauver, elle ne doit pas s’enfermer dans un confort, un élitisme, mais oser aller vers les autres, tout en gardant son identité.

C’est la peur de l’autre qui fait fermer les fenêtres : la peur de se faire contaminer par ce qu’on voit de négatif chez l’autre. Jésus a brisé cela en osant aller vers les autres : il mange avec les pécheurs, il embrasse les lépreux, il appelle le publicain. Nous avons tendance à oublier cela en ne visitant que ceux qui sont comme nous.

Pensez-vous qu’il soit plus difficile pour l’Église occidentale d’accueillir la synodalité ?

C’est mélangé ! Beaucoup sont enthousiastes, mais certains croient que la synodalité va détruire l’Église. Non ! La synodalité est un esprit d’ouverture, mais qui ne renonce en rien à son identité propre. On n’a pas besoin de dire que ce que l’autre fait est bon pour l’accueillir. Sans juger l’autre, en l’accueillant et par ma manière de faire, je peux pousser sa conscience à lui parler.

Quel regard portez-vous sur la Communauté Saint-Martin ?

La particularité que vous avez est que vous êtes des prêtres à la disposition de l’Église universelle. Cela vous donne une ouverture d’esprit sur la dimension universelle de l’Église. En venant ici, je suis émerveillé, surtout en France où l’on raconte partout que les églises, les séminaires sont vides… C’est une très belle expérience pour moi.

Une des particularités de la CSM est la vie commune des prêtres. Selon vous, est-ce un enjeu pour l’Église universelle ?

Ça devrait l’être ! Dans mon archidiocèse de Kinshasa, aucun prêtre ne vit seul. La communauté nous protège, elle est un soutien. Un prêtre qui vit seul dans une paroisse est fragile. Votre modèle devrait être le modèle synodal à proposer aux prêtres : tout prêtre dans l’Église synodale doit vivre en communauté. Il y a une joie à vivre avec les autres, à partager avec eux les expériences de sa journée… La solitude au contraire empêche de partager et rend amer. La vie commune est une belle expérience à proposer aux autres, et on voit bien que c’est une réalité qui attire les jeunes.

Qu’est-ce qui nourrit votre spiritualité sacerdotale ?

L’important, pour la vie spirituelle du prêtre, est la prise de conscience que lui, prêtre, n’est pas un fonctionnaire. Je le constate pour moi : tout le monde veut prendre des photos avec le cardinal… Mais retiens que tu n’es pas un fonctionnaire, pas là pour les honneurs ! Ce qui fait que tu es prêtre, c’est que Dieu te connaît, c’est lui qui t’a fait confiance, t’a choisi, au-delà de tes qualités et de tes défauts. La vie sacerdotale est essentiellement un acte de confiance qui vient de Dieu : Dieu m’a fait confiance. Et si Dieu, tout Dieu qu’il est, me fait confiance, je dois à mon tour lui faire confiance en essayant le mieux possible de mériter sa confiance, et en sachant que je n’y arriverai jamais. Mais ce qui relève de moi, je dois le faire ; le reste, c’est la grâce de Dieu qui complète mon incompétence.

Cela signifie qu’à chaque instant de ma vie, je dois être dans une intimité avec Dieu par la prière. Un prêtre qui ne soigne pas cette partie de sa vie où il est seul-à-seul avec Dieu risque d’être emporté par les affaires du monde. Il faut laisser Dieu parler à ton cœur, sentir la résonnance de ce qu’il te dit : généralement, ça t’oblige à t’améliorer.

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Biographie

Jean-François Guérin

Jean-François Guérin naquit à Loches au cœur de la Touraine le 25 juillet 1929 d’Albert Guérin et de Camille Linard, charcutiers dans cette ville ; il fut baptisé le 9 mars 1930 dans la collégiale Saint-Ours sous le prénom de Jean. Ses deux parents sont originaires d’Artannes-sur-Indre où il suivit sa première scolarité, dans une famille qui n’était pas particulièrement marquée par la foi.

Installé chez sa mère à Paris, il s’ouvrit de sa vocation à un prêtre de Versailles. C’est pourquoi, contre l’avis de sa famille, il entra au séminaire de Versailles, en 1949, à vingt ans. Les premières années de sa formation furant vraiment fondatrices pour lui, marquées par la forte spiritualité sacerdotale enseignée par les formateurs sulpiciens. Ces années furent coupées par son temps de service militaire en Tunisie et marquées par le décès de son père. Premier tournant dans son itinéraire : il décida de quitter Versailles pour revenir à Tours, puis il intégra le Séminaire français de Rome et, le 29 juin 1955, il fut ordonné prêtre en la cathédrale Saint-Gatien par Mgr Gaillard.

D’abord vicaire à la cathédrale de Tours, il fut nommé aumônier des lycées Descartes, Balzac et Grandmont à Tours où sa santé souffre un peu de l’intensité de son engagement auprès des jeunes. Souvent il les emmena à Fontgombault, une abbaye bénédictine qui eut une importance centrale dans sa vie et son sacerdoce : il en devint oblat en 1961. Quittant Tours, il fut envoyé à Paris pour des études de droit canonique, qu’il commença en 1965.  Pendant ces études, il était aussi confesseur à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, où il fut inspiré par les intuitions ecclésiales et missionnaires de Monseigneur Charles, recteur de la Basilique, avec lequel se créa une amitié. Les études terminées, il devint délégué général de l’Œuvre d’Orient en 1968 et garda cette charge, qui consistait à recueillir des fonds pour aider les écoles, dispensaires et œuvres caritatives dans les paroisses de toute la France, jusqu’en 1975.

À Paris, son ministère se déployait entre l’œuvre d’Orient, la mission de chapelain au Sacré Cœur et un ministère qui se dessina peu à peu auprès d’étudiants, hommes et femmes, qui le rejoignirent bientôt pour une heure d’adoration silencieuse mensuelle, à Montmartre. De ce silence, naquit l’idée d’une messe hebdomadaire en 1968. Elle est célébrée à la chapelle du Bon Secours, rue Notre-Dame-des-Champs, chapelle toute proche des bureaux de l’Œuvre d’Orient. L’abbé Guérin entendait donner à ces jeunes gens une solide formation centrée sur la vie intérieure, la vie sacramentelle, sur le discernement des vocations, mariage, sacerdoce, vie religieuse. Son action apostolique auprès de ce groupe comprendra aussi des camps – un mélange entre retraite et vacances, ce qui donna naissance aux futurs « Routes Saint-Martin ». Mais dans le temps de la réforme liturgique, il leur transmit aussi sa docilité envers les décisions du Concile et du Pape, face à certains qui ne veulent rien entendre sur le nouveau missel promulgué par le Pape Paul VI.

Proche des moines bénédictins de Fontgombault et des Sœurs Servantes des Pauvres, l’abbé Guérin accompagna des jeunes vers des vocations religieuses, contemplatives et apostoliques. Mais, plusieurs jeunes gens lui partagèrent leur désir de devenir prêtres diocésains. En février 1976, le cardinal Siri, archevêque de Gênes et Dom Jean Roy, Père Abbé de Fontgombault, se rencontrèrent à Rome où ce dernier demanda au cardinal s’il est possible d’accueillir des amis français à Gênes. L’accord fut immédiat : les études au séminaire seraient gratuites et un couvent capucin situé à dix-sept kilomètres du centre-ville serait mis à leur disposition. C’est alors que le 1er novembre 1976, commença la Communauté Saint-Martin par un cours intensif en italien ; suivirent les travaux à entreprendre au couvent de Voltri qui est en très mauvais état. Les années italiennes furent celles de la fondation, avec l’appui constant du cardinal Giuseppe Siri, qui, à sa démission, nomma l’abbé Guérin chanoine d’honneur de sa cathédrale.

L’année 1993 fut celui du retour en France, pour les membres de la Communauté. Aidé par les premiers membres, l’abbé Guérin guida cette installation à Candé-sur-Beuvron, dans le diocèse de Blois. Ce furent des années plus difficiles, marquées par différents problèmes de santé. L’abbé Guérin fut de plus en plus secondé. En février 2004, il présenta sa démission. Demeuré à Candé, il fut rappelé à Dieu le 21 mai 2005. Après ses obsèques à la cathédrale Saint-Louis de Blois, il fut inhumé au cimetière d’Artannes-sur-Indre, son village natal.

Le 18 juillet 2024, un communiqué faisant état des conclusions du rapport de la visite pastorale a révélé des faits reprochés par plusieurs anciens membres de la communauté à l’abbé Guérin. Nous entendons avec douleur la souffrance que certains ont pu exprimer auprès des visiteurs et allons effectuer courageusement ce travail de relecture qui permettra de faire évoluer cette page. Afin de recueillir la parole des personnes qui souhaiteraient se manifester, vous pouvez contacter, au nom de Mgr Matthieu Dupont qui a été nommé assistant apostolique de la communauté, la Cellule d’écoute des diocèses des Pays-de-Loire à l’adresse suivante : paroledevictimespaysdeloire@gmail.com

Biographie

Don Paul Préaux

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Don Paul Préaux, né le 6 octobre 1964 à Laval (Mayenne), rentre au séminaire de la Communauté Saint-Martin alors installée à Voltri (diocèse de Gênes, Italie) en 1982. Il est ordonné diacre en avril 1988 à Saint Raphaël (Var) par le cardinal Siri et obtient son baccalauréat de philosophie et de théologie. L’année suivante, le 4 juillet, il est ordonné prêtre à Gênes par le cardinal Canestri.

En 1990, don Paul obtient une licence canonique de théologie dogmatique à Fribourg (Suisse) et devient responsable de la maison de formation de Voltri. Il est envoyé à Rome en 1992 pour l’année d’habilitation au doctorat et commence ensuite sa thèse.

Nommé, en 1995, chapelain au sanctuaire de Notre-Dame de Montligeon (Orne), il devient recteur de ce sanctuaire consacré à la prière pour les défunts, charge qu’il occupera jusqu’à son élection comme Modérateur général de la Communauté Saint-Martin. Pendant cette période, don Paul est également membre du conseil presbytéral du diocèse de Sées pendant six ans et secrétaire du même conseil pendant 3 ans.

Docteur en théologie en 2005, don Paul est l’auteur d’une thèse sur Les fondements ecclésiologiques du Presbytérium selon le concile Vatican II et la théologie post-conciliaire. Enseignant la théologie dogmatique à l’École de théologie de la Communauté, depuis 1993, il intervient également dans différents lieux d’enseignement, comme le Centre d’études théologiques de Caen. Il est également sollicité pour prêcher des retraites et intervenir dans différents diocèses et communautés, notamment des thèmes de la spiritualité sacerdotale et de l’espérance chrétienne, sur lesquels il a publié des ouvrages.  Renvoi à la page de ses publications.

Le 26 avril 2010, don Paul Préaux est élu Modérateur général de la Communauté Saint-Martin et réélu en 2016 à cette charge pour un nouveau mandat de six ans. Il est à nouveau élu à cette charge en 2022 pour un dernier mandat.