La formation pour devenir prêtre ne s’apparente à aucun autre type de formation. De la propédeutique à l’ordination, le parcours peut sembler long, mais s’avère indispensable à la maturation intellectuelle, spirituelle et humaine de chaque jeune qui se destine à s’engager dans une voie bien particulière, celle du sacerdoce.
Mais comment se vit cette formation ? Avec quelle liberté les étapes sont-elles validées de part et d’autre ? Immersion au cœur d’un système de formation hors du commun.
Don Léonard, formateur au séminaire, rappelle avant tout que le parcours d’un séminariste est long : « Il faut mûrir la réponse à un appel ! » Ainsi, après l’année de propédeutique qui dispose à l’entrée au séminaire, le jeune enchaîne avec deux années de philosophie puis trois de théologie… auxquelles s’ajoutent une année complète de stage en paroisse entre les deux cycles, ainsi que l’année de diaconat, également en paroisse. A l’issue du séminaire, la majorité se présente au baccalauréat canonique de théologie, l’équivalent d’une licence. Ces années de formation intellectuelle nourrissent la réflexion des séminaristes, « indispensable à l’exercice de leur liberté personnelle. »
Lorsqu’on devient séminariste, rester vraiment libre dans son parcours de discernement est un véritable enjeu, en particulier vis-à-vis du regard et de la pression extérieure éventuelle, sociale et parfois familiale. C’est tout d’abord en développant une réflexion au for interne, sa propre conscience, que le séminariste affute sa liberté : le séminariste est en effet le premier protagoniste de sa formation et de son discernement. « Eclairé par sa vie intérieure, sa prière, les conseils de personnes de confiance, son accompagnateur spirituel, sa formation intellectuelle, le séminariste dispose des éléments pour juger lui-même du chemin qu’il doit emprunter », explique don Léonard.
Cette réflexion personnelle doit encore être confortée par le for externe : l’avis des formateurs et du séminaire qui, plus tard, sera donné à l’évêque qui appelle le candidat au jour de l’ordination. « L’ordination n’est pas un droit, mais un appel. Cela peut être un désir personnel, mais cela doit encore être discerné par le for interne, comme le for externe. Pour répondre à l’appel de Dieu et s’engager pleinement, la liberté du séminariste est fondamentale. »
A chaque étape de sa formation, le séminariste fait le point et se pose en conscience la question de savoir s’il a le désir et les aptitudes requises pour poursuivre sa formation. Chacune de ces étapes se voit formalisée par une lettre de demande de passage à l’étape suivante : admission aux ordres sacrés, lectorat, acolytat, demande d’ordination diaconale, demande d’ordination sacerdotale. A chaque fois, le séminariste doit exprimer formellement qu’il choisit de s’engager, « ce qui n’exclut pas d’inévitables questions bien sûr ! »
La vie commune est également un élément important du discernement. « C’est un laboratoire très intéressant car on se révèle en groupe, explique don Léonard. La particularité chez nous, c’est que ce sont les séminaristes qui font tourner la maison, assumant des charges spécifiques à tour de rôle. C’est un lieu où chacun peut faire l’expérience de sa liberté et de sa volonté de servir le bien commun, de développer des compétences professionnelles aussi, complétées parfois par des stages en entreprise. »
Durant l’année, à Évron, les séminaristes vivent dans un univers assez protégé, mais la formation pastorale, les apostolats et les stages permettent une nécessaire et bénéfique confrontation avec le monde, comme les camps d’été, les stages BAFA/BAFD ou en entreprise, les services dans des lieux confessionnels ou non. « Cette invitation à la liberté est également cultivée par le contact avec d’autres communautés religieuses, la collaboration avec des œuvres extérieures à la communauté, les rencontres avec d’autres séminaires, une vie authentiquement catholique c’est-à-dire avec d’autres réalités de l’Eglise, souligne don Léonard. Autant de rencontres qui enrichissent et favorisent le discernement. »
Finalement, conclut le formateur, « le caractère complet de la formation proposée favorise l’épanouissement dans toutes ses dimensions – humaine, spirituelle, intellectuelle et pastorale – et a pour objectif de permettre à un candidat d’exercer son discernement en mûrissant son choix jusqu’au bout en connaissance de cause, avant de s’engager dans la voie où le Seigneur l’appelle. »
L’un des signes de cette liberté des séminaristes se manifeste dans le fait que sur les dix dernières années, entre un quart et un tiers des entrés quittent le séminaire. « Notre travail est de les aider à discerner la volonté du Seigneur et à confronter leurs attentes avec les exigences de l’Eglise. Un jeune qui sort ? Il a discerné. L’enjeu pour nous est ensuite de l’accompagner dans son nouveau choix de vie, pour autant qu’il le demande ».