Lectio divina pour le troisième dimanche de Carême

Ex.17, 3-7 // Rm.5. 1-8 // Jn.4, 5-42

Nous conseillons vivement, pour méditer la Parole de ce 3ème dimanche de Carême, de choisir la lecture de la totalité du passage de la Samaritaine qui, certes est un peu longue, mais qui seul contient, contrairement à la lecture brève, le nœud central du récit, à savoir l’aveu au Christ de cette femme disant qu’elle n’a pas de mari.

« Seigneur, écoute l’aveu de notre faiblesse ! »

Dans la Collecte arrêtons-nous déjà sur cette supplique de l’Église qui demande à Dieu d’écouter l’aveu de notre faiblesse, à nous les enfants, les pécheurs qui tous les dimanches nous rassemblons pour prier notre Père.

Dans cette demande, nous retrouvons parfaitement la notion d’espace de pauvreté dans lequel il est si important, pour chaque chrétien, d’entrer pour rencontrer le Christ et rencontrer Son Amour.

Il y a justement quelque chose de frappant dans l’Évangile de ce 3ème dimanche c’est qu’il y a en fait deux espaces de pauvreté

Il y a bien sûr l’espace de pauvreté de la femme qui a soif et qui est sans mari.

Mais il y a un deuxième espace de pauvreté : c’est celui de Jésus. Et lui aussi doit être regardé !

Si nous regardions l’homme sans regarder notre Sauveur nous dépéririons nous dit le philosophe Pascal ! Si nous nous contentions de regarder nos péchés sans regarder le mystère de l’Incarnation avec tout ce qu’il comporte nous n’aurions plus qu’à nous supprimer.

Il y a donc cet espace de pauvreté du Christ qui est, par le fait du mystère de l’Incarnation, ici présent aujourd’hui à ce puits de Jacob. Il est fatigué par la chaleur, la Samarie étant une vallée encaissée, sans air, sans eau, -d’où l’importance de ce puits creusé par les Pères pour y faire boire le bétail-. Jésus est vraiment à cette étape comme les hommes dont Il a pris la fragilité : Il est fatigué ! Il en a assez du voyage (comme cela ne nous arrive à nous aussi !), de cette marche sans interruption entre la Galilée et la Judée, puis entre la Judée et la Galilée, avec la chaleur et la faim… Et avec des apôtres qui ne comprennent pas grand-chose !

« Tu es l’œuvre de mes mains, faite pour être belle »

Ces deux espaces de pauvreté sont d’autant plus remarquables si nous les mettons en comparaison avec un autre passage de la Bible qui est celui de la Création.

Là, nous avons la femme dans toute sa beauté, sa pureté : « Tu es l’œuvre de mes mains, faite pour être belle » dit Dieu à travers Isaïe. C’est Ève à peine créée, à peine sortie de l’atelier du divin potier, la mère des vivants, la femme à qui Dieu a confié l’homme comme disait St Jean Paul II, parce que ce grand benêt s’ennuyait tout seul ! Relisons la Genèse : après avoir appelé un chat un chat et un cachalot un cachalot, l’homme dit : Non ce n’est pas l’os de mes os, la chair de ma chair, je m’ennuie ! Et Dieu, dans Sa grande bonté lui donna la femme. Oui Dieu a confié l’homme à la femme !

Et à côté de cette femme qu’est Ève, notre mère, nous avons Dieu dans la gloire de Sa toute-puissance créatrice !

Et pour reprendre cette célèbre citation, tout, dans cet espace de richesse qu’est le Paradis terrestre, tout est luxe, (avec cette végétation luxuriante, chacune selon son espèce, ces animaux chacun selon son espèce…) tout est luxe, calme, ordre et volupté ! Volupté spirituelle de l’entente de l’homme avec Dieu.

Nous remarquons donc le contraste frappant entre cet épisode de la Création et l’épisode de la Samaritaine. C’est ce souvenir de la Genèse qui va pousser notre réflexion un petit peu plus loin.

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

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« Mère voici ton fils ! »

On pourrait se poser la question de savoir si ce n’est pas parce que le Père a confié l’homme à la femme, comme je viens de le rappeler, que le Christ s’est révélé de manière inégalée, en privilégiant la femme.

Lorsque nous relisons l’Évangile nous nous apercevons que le langage que Jésus tient aux hommes, la révélation qu’Il fait aux hommes tient en quelques mots si peu riches : « Suis-moi… », « Venez, et voyez… », « Venez, suivez-moi… » Pourtant c’est à Pierre, c’est à Matthieu, c’est à André, et à Jean que le Seigneur s’adresse !

Mais à la femme -que ce soit indirectement par l’ange Gabriel à Marie, ou que ce soit directement de Sa bouche à la Madeleine le jour de la Résurrection, et dès avant, dès maintenant, dès aujourd’hui à la Samaritaine, Jésus dévoile Son secret, à charge pour la femme de transmettre, d’engendrer spirituellement l’homme, de le féconder dans la foi ! C’est le rôle de Marie, notre Mère, bien entendu, nous le savons : « Mère voici ton fils, fils voici ta mère ! » Mais c’est aussi le rôle de Madeleine qui va avertir Pierre le jour de la Résurrection ; et dès aujourd’hui c’est le rôle de la Samaritaine qui retourne au village et y informe ses concitoyens de la rencontre qu’elle vient de faire !

C’est la femme qui féconde l’homme spirituellement.

Miracle ! Ou plus exactement mystère ! De même que Pierre, croyant en Madeleine se précipite avec Jean pour voir le tombeau vide, de même les Samaritains (qui étaient des gens plutôt durs et rudes) suivent la femme pour voir Celui qu’elle a rencontré qui est un Juif.

Nous sommes en face du mystère de l’enfantement spirituel de l’homme par la femme, ce mystère qui s’enracine très certainement dans cette Création dont j’ai rappelé la phase initiale.

Cela dévoile, bien au-delà de tous les féminismes sociologiques, historiques, politiques, le rôle et la fonction matricielle d’engendrement de la femme : féconder l’homme ! C’est vrai que l’homme féconde la femme charnellement ; mais là, nous nous apercevons que c’est la femme qui féconde l’homme spirituellement : « Maintenant ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons ; nous l’avons entendu nous-mêmes… » disent les villageois à la Samaritaine…

Plus je suis petit, plus c’est beau pour Dieu que je Lui fasse confiance !

Ce mystère de la femme est d’autant plus grand, extraordinaire, inexplicable, d’autant plus merveilleux que cette femme est pécheresse, comme vous toutes et comme nous tous, les hommes !

Elle est dans son péché. C’est pourtant de cette femme -comme de Madeleine qui a été une femme de mauvaise vie- dont Jésus se sert pour enclencher de manière tout à fait extraordinaire la connaissance que l’homme va avoir du Fils de Dieu : « Je le suis moi qui te parle. »

Cette contradiction apparente entre le fait d’être témoin du Christ et d’être pécheur se résout en fait, lorsqu’on se retourne vers Saint Paul quand il dit : « C’est dans mes faiblesses que je me glorifie parce que c’est dans ma faiblesse que se manifeste le plus la puissance de Dieu. » Plus nous sommes petits et misérables plus c’est beau pour Dieu que nous lui fassions confiance !

Plus encore : c’est à cause même de cette pauvreté due à son péché, que la femme va rencontrer Jésus comme Messie, « celui qui doit venir » : « Je le suis moi qui te parle. »

Et c’est pour rencontrer la femme dans sa pauvreté, dans son espace de pauvreté, qu’Il s’est fait pauvre et a créé autour de Lui Son espace de pauvreté de Dieu incarné.

Le péché donc n’est pas, je dirais, un obstacle, il est la raison de la rencontre ! Dieu ne vient pas sur terre en se dérobant aux pécheurs jusqu’à ce qu’ils soient dignes de Le rencontrer avec tous les égards dus à Son rang ! Non ! Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il faille pécher pour rencontrer le Christ, (Saint Paul l’a remarqué avant moi d’ailleurs…) mais le Christ est venu rencontrer les pécheurs.

Donc à partir du moment où nous ne nous voyons pas dans cette catégorie-là, nous ne pouvons pas rencontrer le Christ !

Il faut que nous sortions de ce Carême en étant convaincus que plus nous cherchons à être ‘dignes’ plus nous nous éloignons de Dieu.

La pauvreté de l’homme est misère, la pauvreté de Dieu est richesse !

Remarquons que cette rencontre entre la femme et le Christ ne va se faire que lorsqu’elle va entrer et parce qu’elle va entrer dans l’espace de pauvreté de Jésus.

Cet espace de pauvreté de Jésus, qui est plus globalement le mystère de l’Incarnation, c’est la fragilité humaine dont la soif et la fatigue sont les signes.

Mais cet espace de pauvreté de Jésus est magnifique autant qu’il est tout opposé au nôtre ! Lorsque nous sommes pauvres nous avons chaud, nous avons la fièvre, nous ne sommes pas bien dans notre peau, nous ne voulons voir personne… Pour le Christ c’est le contraire ! C’est là le mystère de la Pauvreté de Dieu qui n’a rien à voir avec notre pauvreté ! La pauvreté de l’homme est misère, la pauvreté de Dieu est richesse.

La pauvreté du Christ est comme un espace, comme une ombre qui miraculeusement Le précède. En général l’ombre nous suit ; là elle précède et elle donne un espace de fraîcheur, de repos, d’apaisement, pour tous ceux qui viennent à Sa rencontre. Si nous relisons l’Évangile, nous nous apercevrons comme tous ceux qui touchent le Christ, tous ceux qui entrent dans cette ombre lumineuse certainement et rafraîchissante -comme les théologiens décrivent le Paradis : « refrigerium locis » : lieu de la fraîcheur- tous ceux qui touchent le Christ sont apaisés !

Il faut entrer dans l’espace de pauvreté du Christ pour être sauvé !

Donc il faut remarquer que la femme va entrer en contact avec Jésus, pas seulement en tant qu’homme, mais en tant que Messie, qu’elle va être ensemencée par Dieu, qu’elle va être fécondée par la Parole avant de féconder les autres, qu’elle va en un mot se convertir.

Insistons sur le fait qu’elle ne le fera qu’à partir du moment où elle entrera dans Son espace de pauvreté, sans oublier que les pauvretés de cette femme ne sont pas l’espace de pauvreté de Jésus, attention !

Elle a des pauvretés et Jésus se plaît à les lui faire souligner, à les mettre en valeur. Elle en a un certain nombre : pauvreté physique : elle a soif ; pauvreté sociologique : c’est une femme donc, pour la mentalité de l’époque, une quasi-exclue ; pauvreté religieuse : c’est une Samaritaine, rejoignant tous les mécréants qu’il y a sur notre planète ! Plus grave encore, pauvreté humaine : elle est concubine ou adultère, ou elle n’a pas de mari, c’est son cinquième… enfin bref c’est une femme de mauvaise vie ou en tous les cas d’échec de mariage, avec divorce, puis remariage, puis nouveau divorce… C’est la pauvreté humaine dans toute son indigence.

Mais attention, tout cela ne rentre pas dans l’espace de pauvreté de Jésus ! Oui, attention, ce n’est pas parce que Lazare est pauvre qu’il se retrouve chez Abraham et ce n’est pas parce que le clochard est pauvre qu’il est sauvé de même que ce n’est pas parce que le riche est riche qu’il est perdu ! Il faut rentrer dans l’espace de pauvreté du Christ pour être sauvé !

La pauvreté sublime est le regard vrai sur sa misère !

Il y a donc la pauvreté sublime de cette femme, la pauvreté qui va assumer toutes les précédentes que je viens de décrire, et même va les éclairer : c’est la pauvreté de l’aveu, la pauvreté de la reconnaissance de sa misère : « Je n’ai pas de mari… » Elle ne ment plus.

Quand je dis que c’est important ce n’est pas parce qu’elle n’a pas de mari et que c’est croustillant d’immoralité ! C’est fondamental car en disant « Je n’ai pas de mari », elle se découvre, elle accepte, elle se voit en vérité et elle la dit cette vérité douloureuse à cet inconnu, à ce Juif qui la subjugue sûrement -sinon elle se serait tue…- ce bel homme qu’elle pouvait séduire en continuant de se cacher, à ses propres yeux, sa pauvreté profonde.

« Je n’ai pas de mari. » Jésus, pour nous montrer l’importance de cet aveu confirme : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari. » Ce n’est pas pour la condamner ; comme Il fit pour la femme adultère : « Va et ne pèche plus ! » C’est pour souligner l’importance de s’inscrire dans la vérité de sa fragilité : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari parce que tu en as eu cinq et celui qui est avec toi actuellement n’est pas ton mari. »

Voilà la pauvreté sublime, le regard vrai sur sa misère, l’aveu qui va faire entrer cette femme dans l’espace de pauvreté de Jésus puisqu’Il est venu, Lui la Vérité pour sauver les hommes de la misère du péché !

C’est cet aveu qui la fait entrer dans cet espace rafraîchissant qui va l’apaiser, et lui donner cette certitude du cœur qu’après cet aveu à cet homme (qui est prophète puisqu’Il a découvert son état) elle n’est pas repoussée, mieux encore : elle est aimée, elle est sauvée !

Quiconque a un cœur peut refaire en lui cette expérience de conversion !

Elle a une connaissance de Dieu qui n’est pas une connaissance de l’idée, mais qui est une expérience du cœur, expérience qui est unique ! D’ailleurs en général nous n’en avons qu’une dans notre vie de ces expériences de Dieu : les expériences de conversion comme saint Augustin, saint Martin et tant d’autres… Cette expérience unique d’un cœur déchiré qui a rencontré quelqu’un à qui aller, à qui parler à qui dire sa misère ses pauvretés, sans être repoussé, c’est extraordinaire !

Cette femme n’était peut-être pas intelligente, peu importe, elle avait un cœur comme chacun de nous. Quiconque a un cœur peut refaire en lui cette expérience.

Jésus va la récompenser de manière discrète, extrêmement délicate. De cette femme qui a donné son adhésion à cet inconnu, à la personne, pas à un livre, à la personne de cet inconnu, Il va consolider l’esprit, Il va édifier sa foi, donc son adhésion intellectuelle en lui révélant alors Son identité.

Nous comprendrons qu’on est bien loin de la preuve du genre : -Oui le Christ est Fils de Dieu parce qu’Il a dit à la Samaritaine : « Je le suis moi qui te parle » Cela c’est pour les manuels d’apologétique !

Mais à elle, qui avait ouvert son cœur à travers son espace de pauvreté qu’elle avait accepté et qu’elle a apporté à Jésus, déposé à Ses pieds, Il lui révèle alors, Il la confirme (comme Il confirmera Pierre : « Je t’ai confirmé pour qu’à ton tour tu confirmes tes frères ») dans sa foi : « Je le suis moi qui te parle. »

« Afin d’éveiller en elle la foi il fit naître l’amour de Dieu »

Il est recommandé, d’ailleurs, de bien écouter la Préface qui sera dite lors de l’Eucharistie. Elle dit : « Il tenait tellement à éveiller la foi dans son cœur qu’il fit naître en elle l’amour de Dieu. »

En général on dit que la foi précède l’amour : je connais et donc j’aime. Là c’est le contraire et cela nous montre que les voies de Dieu sont insondables, c’est vrai ! Mais c’est pour nous montrer aussi que la foi, même la plus intellectuelle, si elle est vraie, part du cœur. « Afin d’éveiller en elle la foi il fit naître l’amour de Dieu » d’abord !

Alors demandons cela dans notre Eucharistie dominicale. Nous demandons un petit peu d’inverser la vapeur, de ne pas nous raidir dans notre foi, dans nos sentiments de dignité : nous sommes chrétiens, pratiquants, parfaits… Non au contraire !

Nous demandons pour entrer dans l’espace de pauvreté de Jésus et donc pour recevoir la Vie qui jaillit en Vie éternelle, nous demandons deux choses : d’abord de reconnaître nos blessures (c’est notre espace de pauvreté) et ensuite de reconnaître le regard d’amour du Médecin divin qu’est Jésus (c’est Son espace de pauvreté à Lui).

Mgr Jean-Marie Le Gall – Communauté Saint Martin

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Biographie

Jean-François Guérin

Jean-François Guérin naquit à Loches au cœur de la Touraine le 25 juillet 1929 d’Albert Guérin et de Camille Linard, charcutiers dans cette ville ; il fut baptisé le 9 mars 1930 dans la collégiale Saint-Ours sous le prénom de Jean. Ses deux parents sont originaires d’Artannes-sur-Indre où il suivit sa première scolarité, dans une famille qui n’était pas particulièrement marquée par la foi.

Installé chez sa mère à Paris, il s’ouvrit de sa vocation à un prêtre de Versailles. C’est pourquoi, contre l’avis de sa famille, il entra au séminaire de Versailles, en 1949, à vingt ans. Les premières années de sa formation furant vraiment fondatrices pour lui, marquées par la forte spiritualité sacerdotale enseignée par les formateurs sulpiciens. Ces années furent coupées par son temps de service militaire en Tunisie et marquées par le décès de son père. Premier tournant dans son itinéraire : il décida de quitter Versailles pour revenir à Tours, puis il intégra le Séminaire français de Rome et, le 29 juin 1955, il fut ordonné prêtre en la cathédrale Saint-Gatien par Mgr Gaillard.

D’abord vicaire à la cathédrale de Tours, il fut nommé aumônier des lycées Descartes, Balzac et Grandmont à Tours où sa santé souffre un peu de l’intensité de son engagement auprès des jeunes. Souvent il les emmena à Fontgombault, une abbaye bénédictine qui eut une importance centrale dans sa vie et son sacerdoce : il en devint oblat en 1961. Quittant Tours, il fut envoyé à Paris pour des études de droit canonique, qu’il commença en 1965.  Pendant ces études, il était aussi confesseur à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, où il fut inspiré par les intuitions ecclésiales et missionnaires de Monseigneur Charles, recteur de la Basilique, avec lequel se créa une amitié. Les études terminées, il devint délégué général de l’Œuvre d’Orient en 1968 et garda cette charge, qui consistait à recueillir des fonds pour aider les écoles, dispensaires et œuvres caritatives dans les paroisses de toute la France, jusqu’en 1975.

À Paris, son ministère se déployait entre l’œuvre d’Orient, la mission de chapelain au Sacré Cœur et un ministère qui se dessina peu à peu auprès d’étudiants, hommes et femmes, qui le rejoignirent bientôt pour une heure d’adoration silencieuse mensuelle, à Montmartre. De ce silence, naquit l’idée d’une messe hebdomadaire en 1968. Elle est célébrée à la chapelle du Bon Secours, rue Notre-Dame-des-Champs, chapelle toute proche des bureaux de l’Œuvre d’Orient. L’abbé Guérin entendait donner à ces jeunes gens une solide formation centrée sur la vie intérieure, la vie sacramentelle, sur le discernement des vocations, mariage, sacerdoce, vie religieuse. Son action apostolique auprès de ce groupe comprendra aussi des camps – un mélange entre retraite et vacances, ce qui donna naissance aux futurs « Routes Saint-Martin ». Mais dans le temps de la réforme liturgique, il leur transmit aussi sa docilité envers les décisions du Concile et du Pape, face à certains qui ne veulent rien entendre sur le nouveau missel promulgué par le Pape Paul VI.

Proche des moines bénédictins de Fontgombault et des Sœurs Servantes des Pauvres, l’abbé Guérin accompagna des jeunes vers des vocations religieuses, contemplatives et apostoliques. Mais, plusieurs jeunes gens lui partagèrent leur désir de devenir prêtres diocésains. En février 1976, le cardinal Siri, archevêque de Gênes et Dom Jean Roy, Père Abbé de Fontgombault, se rencontrèrent à Rome où ce dernier demanda au cardinal s’il est possible d’accueillir des amis français à Gênes. L’accord fut immédiat : les études au séminaire seraient gratuites et un couvent capucin situé à dix-sept kilomètres du centre-ville serait mis à leur disposition. C’est alors que le 1er novembre 1976, commença la Communauté Saint-Martin par un cours intensif en italien ; suivirent les travaux à entreprendre au couvent de Voltri qui est en très mauvais état. Les années italiennes furent celles de la fondation, avec l’appui constant du cardinal Giuseppe Siri, qui, à sa démission, nomma l’abbé Guérin chanoine d’honneur de sa cathédrale.

L’année 1993 fut celui du retour en France, pour les membres de la Communauté. Aidé par les premiers membres, l’abbé Guérin guida cette installation à Candé-sur-Beuvron, dans le diocèse de Blois. Ce furent des années plus difficiles, marquées par différents problèmes de santé. L’abbé Guérin fut de plus en plus secondé. En février 2004, il présenta sa démission. Demeuré à Candé, il fut rappelé à Dieu le 21 mai 2005. Après ses obsèques à la cathédrale Saint-Louis de Blois, il fut inhumé au cimetière d’Artannes-sur-Indre, son village natal.

Le 18 juillet 2024, un communiqué faisant état des conclusions du rapport de la visite pastorale a révélé des faits reprochés par plusieurs anciens membres de la communauté à l’abbé Guérin. Nous entendons avec douleur la souffrance que certains ont pu exprimer auprès des visiteurs et allons effectuer courageusement ce travail de relecture qui permettra de faire évoluer cette page. Afin de recueillir la parole des personnes qui souhaiteraient se manifester, vous pouvez contacter, au nom de Mgr Matthieu Dupont qui a été nommé assistant apostolique de la communauté, la Cellule d’écoute des diocèses des Pays-de-Loire à l’adresse suivante : paroledevictimespaysdeloire@gmail.com

Biographie

Don Paul Préaux

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Don Paul Préaux, né le 6 octobre 1964 à Laval (Mayenne), rentre au séminaire de la Communauté Saint-Martin alors installée à Voltri (diocèse de Gênes, Italie) en 1982. Il est ordonné diacre en avril 1988 à Saint Raphaël (Var) par le cardinal Siri et obtient son baccalauréat de philosophie et de théologie. L’année suivante, le 4 juillet, il est ordonné prêtre à Gênes par le cardinal Canestri.

En 1990, don Paul obtient une licence canonique de théologie dogmatique à Fribourg (Suisse) et devient responsable de la maison de formation de Voltri. Il est envoyé à Rome en 1992 pour l’année d’habilitation au doctorat et commence ensuite sa thèse.

Nommé, en 1995, chapelain au sanctuaire de Notre-Dame de Montligeon (Orne), il devient recteur de ce sanctuaire consacré à la prière pour les défunts, charge qu’il occupera jusqu’à son élection comme Modérateur général de la Communauté Saint-Martin. Pendant cette période, don Paul est également membre du conseil presbytéral du diocèse de Sées pendant six ans et secrétaire du même conseil pendant 3 ans.

Docteur en théologie en 2005, don Paul est l’auteur d’une thèse sur Les fondements ecclésiologiques du Presbytérium selon le concile Vatican II et la théologie post-conciliaire. Enseignant la théologie dogmatique à l’École de théologie de la Communauté, depuis 1993, il intervient également dans différents lieux d’enseignement, comme le Centre d’études théologiques de Caen. Il est également sollicité pour prêcher des retraites et intervenir dans différents diocèses et communautés, notamment des thèmes de la spiritualité sacerdotale et de l’espérance chrétienne, sur lesquels il a publié des ouvrages.  Renvoi à la page de ses publications.

Le 26 avril 2010, don Paul Préaux est élu Modérateur général de la Communauté Saint-Martin et réélu en 2016 à cette charge pour un nouveau mandat de six ans. Il est à nouveau élu à cette charge en 2022 pour un dernier mandat.