Homélie de don Paul Préaux lors du lectorat

« Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis pour que vous alliez et que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure»

Chers frères futurs lecteurs,

Le Seigneur vous a fait attendre cette année, car prévu initialement le 25 mars ces lectorats ont été reportés à aujourd’hui ! Pourquoi cette attente ? A cause de la pandémie et de ses conséquences, écriront les journalistes. Si notre regard en reste à la surface des choses, à l’événementiel, il ne voit que maladie contagieuse, inquiétude pour l’avenir, deuil inconsolable, injustice pour les plus démunis provoqué par ce désastre inédit.

Mais est-ce suffisant ? Ne peut-on pas y voir un signe de la Providence ? Dire d’un événement qu’il est providentiel, c’est non seulement le reconnaître inattendu, mais aussi, selon le contexte, y reconnaître l’action de Dieu, là où d’autres voient l’effet du hasard. La divine providence désigne en effet, « les dispositions par lesquelles Dieu conduit avec sagesse et amour toutes les créatures jusqu’à leur fin ultime » (CEC, 302), c’est-à-dire, pour les hommes, leur union à Dieu. Le Christ nous révèle que nos vies, nos personnes, ne sont pas soumises à un destin aveugle et capricieux, à la fatalité. Le Christ nous sauve de la fatalité. Lorsque Jésus nous parle de la divine Providence dans l’Évangile, il nous parle d’un Père tendre, aimant, qui voit avec dévouement chaque détail de notre vie, même le plus petit qui soit : Deux moineaux ne sont-ils pas vendus pour un sou ? Or, pas un seul ne tombe à terre sans que votre Père le veuille. Quant à vous, même les cheveux de votre tête sont tous comptés. Soyez donc sans crainte : vous valez bien plus qu’une multitude de moineaux (Mt 10,29-31).

Mais attention, cette providence divine n’implique pas que nous restions inactifs ou passifs. Au contraire, nous appartenons au plan providentiel de Dieu, qui nous a confié l’univers et l’humanité.

Vous-mêmes, chers frères, vous avez vu dans cette attente imposée un signe de la providence de Dieu qui vous a permis de creuser davantage votre désir de devenir « lecteurs ». Être plus en vérité devant Dieu et l’Église. Ce sursis vous a rappelé que rien n’est mérité, ni automatique, mais qu’avec Dieu nous sommes toujours dans le registre de la gratuité et de l’abondance. « Ce n’est pas vous qui avez choisi Jésus, c’est lui qui vous a choisis, établis pour que vous alliez et que vous portiez beaucoup de fruit ».

Que le Seigneur puisse nous aider à voir – dans les événements de chaque jour – la divine Providence – la main secourable du Père – qui est la « raison de l’ordre » selon S. Thomas (Cf. Summa Theologica, I, 22, 3 ss.; 103, 1 ss.; Sap. 14, 3; Prov. 8; etc.), le reflet de la pensée de Dieu dans les choses et dans l’histoire. « Elle est la rationalité, sage et bonne, évidente ou cachée, dont tout le monde est imprégné » (Paul VI).

Chers frères, aujourd’hui vous allez recevoir le ministère du Lectorat. Vous voulez donner une plus grande place à la Parole de Dieu dans votre vie, y croire profondément (« car c’est portés par l’Esprit que des hommes ont parlé de la part de Dieu » (II P 1, 21). Nous vous accompagnons de notre prière fervente : que vous soyez des hommes habités en abondance par la Parole de Dieu afin d’acquérir la pensée du Christ, les réflexes du Christ, l’amour du Christ pour son Père. Un jour vous serez des prédicateurs de la Parole. Vous serez la voix de la Parole. Cela présuppose une substantielle perte de soi dans le Christ, en participant à son mystère de mort et de résurrection avec tout votre être : intelligence, volonté et offrande de votre propre corps, comme un sacrifice vivant. Seule la participation au sacrifice du Christ, à son abaissement, rend l’annonce authentique. Cette prédication de la parole, pour être vraie et juste se doit d’aller jusqu’au bout de l’amour qu’elle annonce : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Laissez-vous imprégner par la Parole de Dieu, le Verbe fait chair. Qu’elle devienne votre nourriture quotidienne, votre respiration continuelle. Aimez-la de tout votre cœur, votre âme et de toutes vos forces. C’est vraiment une grande Dame. Aimez-la « comme » votre épouse : écoutez-la souvent, accepter de ne pas toujours la comprendre, serrez-la sur votre intelligence et votre cœur. Embrassez-la. Prenez-en soin. Gardez-la dans votre intimité. Elle éclairera et réjouira votre chemin.

Soyez aussi des hommes de parole, qui ne parlent pas à tort et à travers. Des hommes qui engageront leur vie sur une parole donnée : n’oubliez pas ! le jour de votre ordination vous engagerez votre vie entière sur un échange de paroles : « oui je le veux » ou « je le promets » ! Que votre « oui soit oui », que votre « non soit non ». « Le reste vient du mauvais » dit Jésus.

Aussi, éduquez-vous à parler à bon escient. Saint Antoine disait : « que les paroles se taisent. Que les actions parlent ». « La charité des actes doit précéder celle des mots » soulignait saint Jean-Paul II. Que toute parole qui sorte de vos lèvres soit vraie, éclairante, édifiante et habitées par la bienveillance de Dieu. Mieux que l’on puisse dire en vous voyant vivre : « Vous êtes manifestement une lettre du Christ remise à nos soins, écrite non avec de l’encre, mais avec l’Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierres, mais sur des tables de chair, sur les cœurs » (II Co 3, 3).

J’aimerai pour finir vous citer ce beau texte d’une femme témoin de l’Evangile :

« On ne peut pas être missionnaire sans avoir fait en soi cet accueil franc, large, cordial à la parole de Dieu, à l’Évangile. Cette parole, sa tendance vivante, elle est de se faire chair, de se faire chair en nous. Et quand nous sommes ainsi habités par elle, nous devenons aptes à être missionnaires. Mais ne nous méprenons pas. Sachons qu’il est très onéreux de recevoir en soi le message intact. C’est pourquoi tant d’entre nous le retouchent, le mutilent, l’atténuent. On éprouve le besoin de le mettre à la mode du jour comme si Dieu n’était pas à la mode de tous les jours, comme si on retouchait Dieu…

Une fois que nous avons connu la parole de Dieu, nous n’avons pas le droit de ne pas la recevoir ; une fois que nous l’avons reçue, nous n’avons pas le droit de ne pas la laisser s’incarner en nous, une fois qu’elle s’est incarnée en nous, nous n’avons pas le droit de la garder pour nous : nous appartenons dès lors à ceux qui l’attendent. » (Madeleine Delbrel).

Je confie à saint Michel Garicoït votre lectorat. Ce grand confesseur et directeur spirituel dévoué et recherché avait souvent sur les lèvres ce mot « Me voici » (sans retard, sans retour et sans réserve), auquel il ajoutait cette expression qu’il aimait souvent répéter « En avant toujours ! ». Qu’il soit votre maitre mot.

Amen.

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Biographie

Jean-François Guérin

Jean-François Guérin naquit à Loches au cœur de la Touraine le 25 juillet 1929 d’Albert Guérin et de Camille Linard, charcutiers dans cette ville ; il fut baptisé le 9 mars 1930 dans la collégiale Saint-Ours sous le prénom de Jean. Ses deux parents sont originaires d’Artannes-sur-Indre où il suivit sa première scolarité, dans une famille qui n’était pas particulièrement marquée par la foi.

Installé chez sa mère à Paris, il s’ouvrit de sa vocation à un prêtre de Versailles. C’est pourquoi, contre l’avis de sa famille, il entra au séminaire de Versailles, en 1949, à vingt ans. Les premières années de sa formation furant vraiment fondatrices pour lui, marquées par la forte spiritualité sacerdotale enseignée par les formateurs sulpiciens. Ces années furent coupées par son temps de service militaire en Tunisie et marquées par le décès de son père. Premier tournant dans son itinéraire : il décida de quitter Versailles pour revenir à Tours, puis il intégra le Séminaire français de Rome et, le 29 juin 1955, il fut ordonné prêtre en la cathédrale Saint-Gatien par Mgr Gaillard.

D’abord vicaire à la cathédrale de Tours, il fut nommé aumônier des lycées Descartes, Balzac et Grandmont à Tours où sa santé souffre un peu de l’intensité de son engagement auprès des jeunes. Souvent il les emmena à Fontgombault, une abbaye bénédictine qui eut une importance centrale dans sa vie et son sacerdoce : il en devint oblat en 1961. Quittant Tours, il fut envoyé à Paris pour des études de droit canonique, qu’il commença en 1965.  Pendant ces études, il était aussi confesseur à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, où il fut inspiré par les intuitions ecclésiales et missionnaires de Monseigneur Charles, recteur de la Basilique, avec lequel se créa une amitié. Les études terminées, il devint délégué général de l’Œuvre d’Orient en 1968 et garda cette charge, qui consistait à recueillir des fonds pour aider les écoles, dispensaires et œuvres caritatives dans les paroisses de toute la France, jusqu’en 1975.

À Paris, son ministère se déployait entre l’œuvre d’Orient, la mission de chapelain au Sacré Cœur et un ministère qui se dessina peu à peu auprès d’étudiants, hommes et femmes, qui le rejoignirent bientôt pour une heure d’adoration silencieuse mensuelle, à Montmartre. De ce silence, naquit l’idée d’une messe hebdomadaire en 1968. Elle est célébrée à la chapelle du Bon Secours, rue Notre-Dame-des-Champs, chapelle toute proche des bureaux de l’Œuvre d’Orient. L’abbé Guérin entendait donner à ces jeunes gens une solide formation centrée sur la vie intérieure, la vie sacramentelle, sur le discernement des vocations, mariage, sacerdoce, vie religieuse. Son action apostolique auprès de ce groupe comprendra aussi des camps – un mélange entre retraite et vacances, ce qui donna naissance aux futurs « Routes Saint-Martin ». Mais dans le temps de la réforme liturgique, il leur transmit aussi sa docilité envers les décisions du Concile et du Pape, face à certains qui ne veulent rien entendre sur le nouveau missel promulgué par le Pape Paul VI.

Proche des moines bénédictins de Fontgombault et des Sœurs Servantes des Pauvres, l’abbé Guérin accompagna des jeunes vers des vocations religieuses, contemplatives et apostoliques. Mais, plusieurs jeunes gens lui partagèrent leur désir de devenir prêtres diocésains. En février 1976, le cardinal Siri, archevêque de Gênes et Dom Jean Roy, Père Abbé de Fontgombault, se rencontrèrent à Rome où ce dernier demanda au cardinal s’il est possible d’accueillir des amis français à Gênes. L’accord fut immédiat : les études au séminaire seraient gratuites et un couvent capucin situé à dix-sept kilomètres du centre-ville serait mis à leur disposition. C’est alors que le 1er novembre 1976, commença la Communauté Saint-Martin par un cours intensif en italien ; suivirent les travaux à entreprendre au couvent de Voltri qui est en très mauvais état. Les années italiennes furent celles de la fondation, avec l’appui constant du cardinal Giuseppe Siri, qui, à sa démission, nomma l’abbé Guérin chanoine d’honneur de sa cathédrale.

L’année 1993 fut celui du retour en France, pour les membres de la Communauté. Aidé par les premiers membres, l’abbé Guérin guida cette installation à Candé-sur-Beuvron, dans le diocèse de Blois. Ce furent des années plus difficiles, marquées par différents problèmes de santé. L’abbé Guérin fut de plus en plus secondé. En février 2004, il présenta sa démission. Demeuré à Candé, il fut rappelé à Dieu le 21 mai 2005. Après ses obsèques à la cathédrale Saint-Louis de Blois, il fut inhumé au cimetière d’Artannes-sur-Indre, son village natal.

Le 18 juillet 2024, un communiqué faisant état des conclusions du rapport de la visite pastorale a révélé des faits reprochés par plusieurs anciens membres de la communauté à l’abbé Guérin. Nous entendons avec douleur la souffrance que certains ont pu exprimer auprès des visiteurs et allons effectuer courageusement ce travail de relecture qui permettra de faire évoluer cette page. Afin de recueillir la parole des personnes qui souhaiteraient se manifester, vous pouvez contacter, au nom de Mgr Matthieu Dupont qui a été nommé assistant apostolique de la communauté, la Cellule d’écoute des diocèses des Pays-de-Loire à l’adresse suivante : paroledevictimespaysdeloire@gmail.com

Biographie

Don Paul Préaux

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Don Paul Préaux, né le 6 octobre 1964 à Laval (Mayenne), rentre au séminaire de la Communauté Saint-Martin alors installée à Voltri (diocèse de Gênes, Italie) en 1982. Il est ordonné diacre en avril 1988 à Saint Raphaël (Var) par le cardinal Siri et obtient son baccalauréat de philosophie et de théologie. L’année suivante, le 4 juillet, il est ordonné prêtre à Gênes par le cardinal Canestri.

En 1990, don Paul obtient une licence canonique de théologie dogmatique à Fribourg (Suisse) et devient responsable de la maison de formation de Voltri. Il est envoyé à Rome en 1992 pour l’année d’habilitation au doctorat et commence ensuite sa thèse.

Nommé, en 1995, chapelain au sanctuaire de Notre-Dame de Montligeon (Orne), il devient recteur de ce sanctuaire consacré à la prière pour les défunts, charge qu’il occupera jusqu’à son élection comme Modérateur général de la Communauté Saint-Martin. Pendant cette période, don Paul est également membre du conseil presbytéral du diocèse de Sées pendant six ans et secrétaire du même conseil pendant 3 ans.

Docteur en théologie en 2005, don Paul est l’auteur d’une thèse sur Les fondements ecclésiologiques du Presbytérium selon le concile Vatican II et la théologie post-conciliaire. Enseignant la théologie dogmatique à l’École de théologie de la Communauté, depuis 1993, il intervient également dans différents lieux d’enseignement, comme le Centre d’études théologiques de Caen. Il est également sollicité pour prêcher des retraites et intervenir dans différents diocèses et communautés, notamment des thèmes de la spiritualité sacerdotale et de l’espérance chrétienne, sur lesquels il a publié des ouvrages.  Renvoi à la page de ses publications.

Le 26 avril 2010, don Paul Préaux est élu Modérateur général de la Communauté Saint-Martin et réélu en 2016 à cette charge pour un nouveau mandat de six ans. Il est à nouveau élu à cette charge en 2022 pour un dernier mandat.